F comme Faillite et Séparation de Biens

Au cours des lectures des différents actes notariés qui ont été passés par "mes" parisiens, j'ai été surprise de voir mentionné si souvent la séparation de biens.

En 1690 lors de l'inventaire après décès de sa tante Renée GIGOT, il est mentionné que Madeleine GIGOT et son mari François GOUSSAULT sont séparés quant aux biens et patrimoine, ils ne sont pourtant mariés que depuis 8 ans. En 1646 c'était le cas pour ses grands-parents maternels Pierre NOËL et Catherine DEBEZE, mais aussi pour d'autres membres de la famille. Les époux étaient pourtant mariés selon la coutume de Paris qui instituait la communauté de biens, la dot apportée lors du mariage permettant au marchand d'augmenter le volume de ses affaires.

Les séparations de biens ne sont pas rares dans la bourgeoisie marchande parisienne. Dans le milieu des boutiquiers, la conjoncture économique, la mauvaise gestion, le recours au crédit explique une certaine fragilité économique et une fréquence des séparations de biens plus importante.

En cas de faillite, l'épouse pouvait demander une sentence de séparation de biens : c'est-à-dire la dissolution de la communauté afin de reprendre sa dot et les successions qu'elle a pu recevoir depuis son mariage et qui ont été incorporées dans la communauté. Plus elle formulait cette demande tôt, plus elle avait de chance d'être prioritaire sur les autres créanciers. Jusqu'en 1730, le couple séparé de biens poursuivait la vie commune et rétablissait sa communauté de biens dès que possible. Pour certains la faillite était trop importante pour rester à Paris, le failli quittait donc la capitale pour la province, les îles ou un autre pays, laissant femme et enfants à Paris.

Madeleine et son époux ont-ils continué la vie commune car les motifs qui ont occasionné leur séparation ont cessé ? François GOUSSAULT a-t-il fait faillite ? Les ennuis financiers se sont-ils estompés ? Cette séparation de biens était-elle la prémisse bien des années plus tard du départ toulousain ?

En cas de séparation, l'établissement des enfants était une charge qui revenait à l'épouse. Les filles faisaient souvent des mariages inférieurs à leur rang social à cause de leur maigre dot. En épousant Jean Olivier de Bermon, Magdeleine, seule enfant du couple, a échappé à ce schéma. Est-ce pour cela que son futur beau-père refusait cette union ?

Afin de mieux cerner cette séparation, il me faudra trouver des actes antérieurs et postérieurs à cette séparation dans les archives du Chatelet et chez les notaires. Si la personne est séparée de bien par sentence du Chatelet, les jugements de séparation de biens sont consultables au CARAN Minutier central des notaires, minutes de la chambre du conseil cotes Y 8546 à 9125 (1596-1791). A rajouter à ma liste !


Sources : 
Laurence CROQ, « La vie familiale à l'épreuve de la faillite : les séparations de biens dans la bourgeoisie marchande parisienne aux XVIIe-XVIIIe siècles », Annales de démographie historique, 2009/2 (n° 118), p. 33-52. https://www.cairn.info/revue-annales-de-demographie-historique-2009-2-page-33.htm

Marie LANDELLE - "Les plaintes en séparation sont éternelles" : la séparation de biens dans la haute société parisienne au milieu du XVIIIe siècle, 1730-1761. https://www.chartes.psl.eu/fr/positions-these/separation-biens-haute-societe-parisienne-au-milieu-du-xviiie-siecle-1730-1761


Commentaires

  1. Je n'ai encore jamais réussi à trouver une sentence de séparation de biens - et pourtant j'ai souvent des dates. Mais le archives du Chatelet, la série Y - sont souvent très mal écrites, et c'est une vraie galère pour y faire des recherches. Merci aussi pour les sources que je ne connaissais pas

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  2. Traces et Petits caillouxlundi, 07 novembre, 2022

    J'ai découvert une Séparation de biens pour un ancêtre charretier en 1903, ce qui m'intrigue beaucoup.

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